*Environ quatre jours après que Raeldyr soit revenu en Ekoï, il reçut un coup de téléphone d'Alwin Zohokan. Ce dernier avait appris que le Patriarche Dernör venait lui rendre visite deux jours plus tard.
Il précisa qu'ils auraient d'abord à discuter des derniers événements, mais qu'il était disponible pour un temps plus long. Il ne lui avait pas fourni les détails de "l'après", mais avait exprimé que c'était important.
En bref, Raeldyr devait être présent dans le domaine lorsque le Patriarche arriverai, mais il ne devrait pas se faire voir avant qu'Alwin ne lui permette d'entrer. Bien entendu, la rencontre se ferait à l'insu de la famille présente, qui le prend toujours pour Runson Daselt, un ami de Svenhyr.*
#Putain, j'ai une gueule affreuse...#
*C'était le jour. Alors qu'il se préparait chez lui avant de partir au domaine Zohokan, Raeldyr ne s'était jamais senti aussi anxieux de ce qu'il s’apprêtait à faire, et son miroir lui rendait très bien. Il avait le sentiment d'un combat qu'il n'était pas sûr de gagner. Mais il l'avait voulu. Il avait choisi. Il ne laissera pas la lâcheté s'emparer de lui, comme la dernière fois.
Lorsqu'il arriva au manoir Zohokan, il était méconnaissable. Son costume neuf avait été réalisé de main de maître par l'artisan que Rödschrek lui avait présenté et le transformait vraiment, dans le bon sens du terme, les cheveux parfaitement noués sur la nuque... Sauf sa cicatrice qui dépassait de son col, il était pratiquement impossible de le reconnaître du premier coup d'oeil.
Il avait pris soin de communiquer à Alwin l'heure de son arrivée, afin d'esquiver au maximum la présence des autres membres de la famille, et sur les instructions du patriarche, il attendit, caché. Il attendit l'arrivée de son père, il attendit la fin de sa conversation avec Alwin... Et plus il attendait, plus son anxiété grandissait.*
*Alwin accueillit Raeldyr dès qu'il arriva, il avait attendu derrière la porte pour s'assurer que personne ne le voie avant lui. Il le fit monter à l'étage et l'installa dans une des chambres d'amis, le temps que tout se passe. De là, Raeldyr pouvait discrètement observer la cour intérieur.
Environ une heure plus tard, Arnvald Dernör venait au domaine. Comme pour toute visite diplomatique, il était venu vêtu de vêtements stricts, royaux et impeccables, portant fièrement le blason de sa famille, un arbre majestueux surmonté d'une couronne. La Patriarche était d'un grand âge, il avait récemment dépassé les 170 ans. Pourtant, il se tenait toujours droit et marchait d'un pas assuré comme s'il avait eu 50 ans de moins.
Alwin l'introduisit dans le domaine, où ils discutèrent un instant avant que le Patriarche Dernör décide de se rendre à la cour. Selon le rituel habituel, Alwin le laissait se recueillir seul devant le caveau. Arnvald Dernör marcha d'un pas tranquille dans la cour intérieur. Il passa devant les parterres de fleurs, franchit le petit pont surplombant le cours d'eau artificiel de la cour, pour parvenir à la petite île artificielle servant de caveau à la lignée Zohokan.
L'allure du Patriarche était toujours aussi stricte, mais il s'arrêtait parfois en chemin, observant les fleurs, le pont, l'entrée du caveau, d'un air pensif, voire mélancolique. Finalement, il entra dans le caveau, et n'en ressortit qu'une demi-heure plus tard. Sa stature aurait put sembler similaire à n'importe qui, mais un œil averti pouvait repérer la légère courbure des épaules et la démarche plus lente reflétant l'esprit d'un homme fatigué par les années et la peine.
Il retourna au domaine, deux bonnes heures s'écoulèrent durant lesquelles ils discutèrent dans la salle sécurisées de l'étage. Puis, après ce qui semblait être une éternité, Alwin vint frapper à la porte.*
J'espère que vous êtes prêt, je doute qu'il ait la patience de l'hésitation.
*Raeldyr tournait le dos à la porte lorsqu'Alwin vint le retrouver. Il prit une profonde inspiration pour calmer ses légers tremblements résultant de son état de panique intérieure, et rejoignit Alwin à la porte de la pièce.*
On n'est jamais réellement prêt dans une situation pareille, prétendre le contraire serait une idiotie. Mais nous ferons avec. S'il fallait reculer, c'était avant.
Je vous suis.
*Alwin le mena à la salle du deuxième étage. Il n'entra pas, ce n'était pas son rôle. Il se contenta de l'inviter à ouvrir la porte et entrer, puis tourna les talons. Le reste ne le regardait pas.
A l'intérieur, la lumière était tamisée, on y voyait difficilement. Il y avait une grande table, de celles que l'on peut voir les des réunions des Grandes Familles. Au bout de cette table, complètement à l'opposé, était assis Arnvald Dernör, attendant de savoir qui venait le rencontrer et pourquoi. L'obscurité masquait l'essentiel de ses traits, mais sa silhouette n'en restait pas moins reconnaissable.*